Référence

Algan Yann, Guyon Nina, Huillery Elise. Rapport au Fonds d'expérimentation pour la jeunesse. Avril 2015.

Résumé

Dans le cadre d’une grande expérimentation nationale soutenue par le Fonds d’expérimentation pour la jeunesse (FEJ), l’équipe de recherche a évalué les effets du dispositif de médiation sociale « France Médiation » et d’un dispositif de prise de conscience du niveau de violence. Le dispositif porté par France Médiation reposait sur l’intervention d’un médiateur social, extérieur à l’institution scolaire, dans des ensembles formés d’un collège et de 2 ou 3 écoles, tandis que le dispositif de prise de conscience reposait sur l’administration et la restitution d’une enquête de victimation menée auprès des élèves de CM1 et de CM2. Il postulait que le diagnostic posé par l’enquête permettrait à la communauté éducative de s’approprier les enjeux et de développer de manière autonome des projets pour diminuer la violence entre pairs.

L’enquête finale déployée a été déployée à la fin de l’année scolaire 2013-2014, soit près de 18 mois après l’arrivée des premiers médiateurs et environ 12 mois après l’administration de l’enquête de victimation. Elle a concerné tous les établissements scolaires de l’échantillon, c’est-à-dire 5 829 collégiens (80 collèges) et 7 859 écoliers (226 écoles).

La rigueur du protocole d’évaluation permet de disposer de résultats ne souffrant pas des biais méthodologiques habituellement observés en ce qui concerne la mesure de l’impact de ce type de programme. Les effets du dispositif MSMS sont très marqués au collège, lorsque le médiateur est un adulte expérimenté. Ce résultat peut s’expliquer par l’action plus soutenue des médiateurs de ce sous-échantillon, mais également par leur surcroît d’autorité, de crédibilité et de compétences. Sur l’ensemble des élèves, le taux de harcèlement diminue de 11 %. Cet effet moyen, non statistiquement significatif, cache en fait une forte hétérogénéité de l’impact du dispositif selon le sexe et le niveau de scolarisation. Ainsi, le taux de harcèlement déclaré par les garçons de 6ème diminue presque de moitié.

Le programme semble surtout agir sur les élèves les plus touchés initialement par le harcèlement. Ce résultat paraît d’autant plus robuste qu’il s’accompagne d’une amélioration du bien-être psychologique et de l’estime de soi sociale des élèves. Signe des effets bénéfiques de cette expérience : l’absentéisme scolaire des garçons de 6ème diminue également. De manière plus générale, le programme a contribué à un climat scolaire plus positif, marqué par une intensification de la relation école-famille et une diminution de l’absentéisme des enseignants.

Néanmoins, les enseignements de cette évaluation ne permettent pas de trancher sur l’âge le plus propice pour intervenir auprès des élèves. Les effets du programme MSMS observés au collège ne sont pas avérés dans le premier degré. Cette absence de résultat peut être éclairée par la moindre présence des médiateurs dans les écoles primaires relativement au temps passé dans les collèges ou, pour reprendre l’hypothèse de Ttofi et Farrington (2011), par la plus grande maturité des élèves du secondaire qui développeraient plus facilement les habiletés sociales attendues.

Le dispositif de prise de conscience semble, pour sa part, avoir avoir augmenté les violences observées par les professionnels. Il a également entraîné une moindre tolérance à l’égard des actes de violence. Il n’a en revanche pas eu d’effet significatif sur les victimations déclarées par les élèves.